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Nouveau texte sur la rupture brutale de relations commerciales établies

Le 07 mai 2019
Le nouvel article L.442-1 II du Code de Commerce modifie plusieurs points relatifs à la rupture brutale de relations commerciales établies, créant notamment une durée plafond de préavis exonératoire d


Les dispositions légales relatives à la responsabilité du cocontracant pour rupture brutale de sa relation commerciale ont été mises en place en 1996 et codifiées sous l’article L.442-6-1 du Commerce.

Ce texte était alors rédigé comme suit : « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers … de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels… »

La loi imposait ainsi, pour mettre un terme à une relation commerciale, de prévenir impérativement son partenaire par écrit en respectant un délai de préavis d’une durée proportionnelle à celle de la durée de la relation interrompue.

L’article L.442-6-1 laissait un grand nombre de points non éclaircis tenant notamment à la qualité de l’auteur et de la victime de la rupture ainsi qu’à la fixation de la durée de préavis à respecter, ce qui a engendré un contentieux judiciaire nourri.

C’est probablement ce qui a conduit le législateur a modifié les dispositions susvisées remplacées par un nouvel article L.442-1 II du code de commerce entré en vigueur le 26 avril 2019 et qui dispose : « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, pour toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l’absence d’un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels. En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l’auteur de la rupture en peut être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de dix-huit mois… »

De prime abord, le nouveau texte est relativement proche du premier.

Cependant, en premier lieu, il donne une nouvelle définition de l’auteur de la rupture basée sur la nature de son activité puisqu’est désormais visée « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services. »

Cette définition est plus large que la précédente qui ne concernait, par exemple, pas les professionnels libéraux comme auteurs possibles d’une rupture brutale de relation commerciale.

En second lieu, sans fournir de réelle précision sur les modalités de calcul de la durée de préavis à respecter, le nouveau texte indique cependant que cette durée est déterminée en fonction « notamment de la durée de la relation commerciale…».

Du fait de l’ajout de l’adverbe « notamment », la durée de la relation rompue n’est ainsi plus le seul critère pour apprécier la durée du préavis à respecter.

De ce point de vue le nouveau texte est conforme aux solutions jurisprudentielles antérieures qui, pour déterminer la durée du préavis à respecter se fondaient déjà, non seulement sur la durée de la relation, mais également sur :

-          L’éventuel état de dépendance économique du partenaire évincé ;

-          Les caractéristiques du marché pouvant par exemple limiter les autres sources d’approvisionnement ;

-          L’importance des restructurations à mettre en place pour réorienter son activité ;

-          Etc.

Enfin, en troisième et dernier lieu, le nouveau texte pose, en quelque sorte, une durée maximale de délai de préavis à respecter quelque soit les caractéristiques de la relation commerciale interrompue : « la responsabilité de l’auteur de la rupture en peut être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de dix-huit mois… »

Cette durée maximale est donc fixée à 18 mois : l’auteur de rupture ne peut être sanctionné sur le fondement de l’article L.442-1 II s’il respecte un préavis de 18 mois.

Il s’agit d’un délai relativement important qui n’est retenu en jurisprudence que pour des relations commerciales soit très longues, soit dont la rupture place le partenaire évincé, compte tenu d’un des contextes particuliers susvisés, en grandes difficultés.

Le plafond légal de préavis prévu par le nouvel article L.442-1 II du Code de commerce ne concerne ainsi qu’une frange très réduite des ruptures de relations commerciales.

Surtout, il n’est pas certain que ce plafond s’applique aux nouvelles décisions judiciaires rendues en la matière. En d’autres termes, si la lettre de rupture d’une longue relation commerciale ne vise pas de préavis du tout où un préavis de moins de 18 mois, le juge est-il limité par ce plafond où peut-il fixer le préavis qui aurait dû être respecté au-delà de ce plafond ?

Manifestement, la jurisprudence en matière de rupture brutale de relations commerciales établies a encore de beaux jours devant elle.

(Les informations contenues dans cet article, bien qu'elles soient de nature juridique, ne constituent ni un avis juridique, ni une consultation. Pour tout litige ou problématique en rapport avec le sujet traité vous êtes invités à prendre contact avec un avocat en droit des affaires)

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