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Présentation générale de la réforme du droit des contrats (1ère partie)

Le 11 avril 2016
La réforme du droit des contrats est avant tout destinée à clarifier les dispositions du code civil relatives à cette matière en y intégrant moultes règles et principes dégagés par la jurisprudence

Bien moins médiatique que la désormais fameuse « loi travail », la réforme du « droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations » a été adoptée sans bruit suivant ordonnance du 10 février 2016 n°2016-131 dont les dispositions seront applicables aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016.

En réalité, il s’agit davantage d’une remise en forme du droit antérieur que d’une véritable réforme, et ce dans un souci de clarification des règles applicables. (I)

Un certain nombre de règles et de dispositifs nouveaux font néanmoins leur entrée dans le code civil, la plupart guidés par le principe de bonne foi et la recherche d’un meilleur équilibre contractuel. (II)

  1. LES APPORTS DIDACTIQUES DE LA REFORME

La volonté du législateur de codifier de manière plus compréhensible le droit des contrats et des obligations se manifeste à deux niveaux :

-         -   par la réorganisation du plan du Code civil relatif à l’ensemble du droit des obligations ;

-        -  par la codification de nombreux principes et solutions juridiques jusqu’alors uniquement posés par la jurisprudence et enseignés par la doctrine.

I.1 Une réorganisation du plan du Code civil relatif aux obligations

Plus de deux cents ans après l’entrée en vigueur du Code de 1804, l’ordonnance du 10 février 2016 réorganise l’ensemble du droit des obligations contenu dans celui-ci en adoptant une présentation plus cohérente.

La matière fait désormais l’objet de trois grandes parties :

-       -   « Les sources d’obligations » (Titre III) qui sont au nombre de trois : le contrat, la responsabilité extracontractuelle, et les autres sources d’obligation (quasi-contrats)

-     -  « le régime général des obligations » (Titre IV) qui définit les différents types d’obligations (conditionnelle, à terme, etc.), leur mode de transmission (cession de créances, de dettes, novation, etc), les actions ouvertes au créancier (action paulienne, action oblique), les modes d’extinction des obligations (paiement, compensation, remise de dettes, etc.), et les restitutions.

-         -   « la preuve des obligations » (Titre IV bis)

On retrouve la même intention didactique au niveau du sous-titre consacré au contrat proprement dit qui est composé de chapitres qui correspondent à des subdivisions logiques et chronologiques :

-         -  Chapitre 1 relatif aux grands principes gouvernant la matière (consensualisme, bonne foi, etc.)

-         -  Chapitre 2 sur la formation du contrat

-         -  Chapitre 3 sur l’interprétation du contrat

-         -  Chapitre 4 sur les effets du contrat

Du fait de cette restructuration du code civil, tous les « grands articles fondamentaux » du droit des contrats et des obligations voient leur numérotation modifiée, sans doute au grand désarroi de l’ensemble des praticiens.

Ci-dessous un tableau de concordance, non exhaustif, relatif aux textes les plus usuels, pour ne pas dire « célèbres » qui vont perdre leur chiffre emblématique :

Ancienne numérotation

Nouvelle numérotation

1116 (dol)

1137

1134 (force obligatoire du contrat)

1103 et 1104

1152 (clause pénale)

1231-5

1165 (effet relatif du contrat)

1199

1184 (résolution du contrat)

1224

1244-1 (délai de paiement)

1343-5

1315 (charge de la preuve)

1353

1382 (responsabilité délictuelle)

1240

 

I.2 Une codification des grands principes et des solutions prétoriennes antérieurs

L’objectif de simplification du droit des obligations poursuivi par l’ordonnance du 10 février 2016, se retrouve ensuite dans la création d’articles nouveaux codifiant de nombreux concepts juridiques déjà bien établis, mais qui n’existaient auparavant qu’au niveau de la jurisprudence ou de la doctrine.

Sans que la liste soit exhaustive on peut ainsi citer les nombreux exemples suivants :

Article 1102 sur la liberté de contracter : « Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi. La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l’ordre public. »

Articles 1172 et 1109 sur le consensualisme : « Les contrats sont par principe consensuels. » ; « le contrat est consensuel lorsqu’il se forme par le seul échange des consentements quel qu’en soit le mode d’expression ».

Articles 1113 et suivants relatifs à la rencontre de l’offre et de l’acceptation « Le contrat est formé par la rencontre d’une offre et d’une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s’engager… »

Article 1120 rappelant le principe selon lequel juridiquement « le silence ne vaut pas acceptation ».

Article 1137 alinéa 2 intégrant expressément au code civil la notion de réticence dolosive : « Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

Articles 1156 et suivants codifiant la théorie du mandat apparent : « L’acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté. »

Article 1169 sur la nullité pour vileté du prix : « Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire. »

Article 1170 codifiant la jurisprudence «dite « Chronopost » et aussi « Oracle » : « Toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite. »

Article 1179 relatif au régime des nullités relatives et absolues : «La nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l’intérêt général. Elle est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d’un intérêt privé. » 

Article 1192 rappelant qu’ « on ne peut interpréter les clauses claires et précises [d’un contrat] à peine de dénaturation ».

Article 1210 rappelant le principe d’interdiction des engagements perpétuels : « Les engagements perpétuels sont prohibés. Chaque contractant peut y mettre fin dans les conditions prévues pour le contrat à durée indéterminée. »

Article 1219 qui codifie le principe d’exception d’inexécution : « Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave. »

Article 1225 qui consacre et encadre le régime de la clause résolutoire : « La clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat. La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire. »

Toutes ces règles ancrées dans notre droit depuis des décennies font donc désormais l’objet de dispositions particulières et précises du Code civil pour en facilité la connaissance et l’usage par les praticiens, voir les justiciables, ce qui ne peut qu’être approuvé.

(Suite : Présentation de la réforme du droit des contrats (2ème partie))


(Les informations contenues dans cet article, bien qu'elles soient de nature juridique, ne constituent ni un avis juridique, ni une consultation. Pour tout litige ou problématique en rapport avec le sujet traité vous êtes invités à prendre contact avec un avocat en droit des contrats)

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