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Nullité du cautionnement bancaire pour irrégularité de forme

Le 22 avril 2011
Parce que ce sont des actes dangereux, certains cautionnements font l'objet d'une règlementation précise. Tel est le cas du cautionnement bancaire.



L’acte de cautionnement est une garantie très courante que l’on rencontre fréquemment en cas d’emprunt bancaire ou de contrat de bail.

Il permet au créancier d’avoir, à côté de son débiteur direct (emprunteur, locataire), un débiteur supplémentaire de substitution : la caution.

En signant l’acte de cautionnement, la caution s’engage en effet à payer le créancier à la place du débiteur initial en cas de défaillance de ce dernier.

Compte tenu des risques pécuniaires que présente un tel engagement, le droit a toujours encadré de manière formaliste l’acte de cautionnement, et cette tendance ne fait que s’accentuer depuis quelques années.

Le formalisme « de base » est prévu par l’article 1326 du Code civil qui impose que soit porté de manière manuscrite par la caution le montant, en chiffres et en lettres, de la dette pour laquelle il se porte garant.

Cette protection n’est cependant que relative, dans la mesure où la jurisprudence considère depuis toujours que la violation de l'article 1326 n'entraîne pas la nullité du cautionnement mais lui fait seulement perdre sa pleine valeur probatoire.

En d’autres termes, le créancier pourra toujours se prévaloir d’un cautionnement irrégulier en la forme mais il devra alors, pour obtenir la condamnation de la caution à son profit, présenter au juge des éléments extrinsèques démontrant que ladite caution s'est engagée en pleine connaissance de cause, notamment en produisant des correspondances ou des attestations.
 
Le formalisme imposé par le Code civil est donc apparu insuffisant au législateur pour protéger la caution, et notamment dans les cas les plus fréquents où celle-ci est mise en place à savoir : en garantie d’un loyer d’habitation et vis-à-vis des banques.

En matière de bail d’habitation, la loi du 6 juillet 1989 (article 22-1) est ainsi venue au secours de la caution dans les termes suivants :

« La personne qui se porte caution fait précéder sa signature de la reproduction manuscrite du montant du loyer et des conditions de sa révision tels qu'ils figurent au contrat de location, de la mention manuscrite exprimant de façon explicite et non équivoque la connaissance qu'elle a de la nature et de l'étendue de l'obligation qu'elle contracte et de la reproduction manuscrite de l'alinéa précédent. Le bailleur remet à la caution un exemplaire du contrat de location. Ces formalités sont prescrites à peine de nullité du cautionnement. »

Le système est très protecteur car le non respect des mentions obligatoires à reproduire entraîne cette fois-ci la nullité automatique du cautionnement, sans même pour la caution à avoir à justifier d’un quelconque préjudice.

De manière plus récente encore, la loi du n°2003-721 du 1er août 2003 a créé les articles L.341-2 et L.341-3 du Code de la consommation aux termes desquels :

« Toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même.

Lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X...»

Ce texte vise les cautionnements contractés à l’égard d’un créancier professionnel, ce qui correspond en pratique principalement aux établissements financiers dispensateurs de crédit.

Comme en matière de bail, le formalisme mis en place par le Code de la consommation est édicté à peine de nullité, celle-ci étant automatique sans que la caution ait à justifier d’un grief.

Dans un arrêt du 5 mars 2009 la Cour d’Appel de PARIS a ainsi prononcé la nullité d’un acte de cautionnement préparé par la banque bénéficiaire et qui avait fait écrire par la caution une formulation qui reprenait en les mixant, de manière plus ou moins heureuse, les formules des articles L.341-2 et L.341-3. Du fait de cette nullité du cautionnement la caution s’est trouvée entièrement libérée de ses obligations.

Deux arrêts rendus par la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation le 5 avril 2011 (09-14358 et n°10-16426) ont apporté un éclairage plus précis sur les conditions du non respect du formalisme du cautionnement bancaire.

Dans la première décision, la Haute Juridiction pose ainsi le principe suivant :

« La nullité d'un engagement de caution souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel est encourue du seul fait que la mention manuscrite portée sur l'engagement de caution n'est pas identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, à l'exception de l'hypothèse dans laquelle ce défaut d'identité résulterait d'erreur matérielle. »

La Cour rappelle ici le caractère automatique de la nullité encourue par l’acte de cautionnement illicite. Elle laisse cependant une exception à ce principe : lorsque la non reproduction exacte des dispositions du Code de la consommation est le fruit d’une erreur matérielle.

Dans la même vaine, la seconde décision valide un acte de cautionnement qui ne différait des mentions impératives des articles L.341-2 et L.341-3, que par l’adjonction d’une virgule supplémentaire :

« L'apposition d'une virgule entre la formule caractérisant l'engagement de caution et celle relative à la solidarité n'affecte pas la portée des mentions manuscrites conformes aux dispositions légales. »

Au vu de ces décisions, il apparaît que la nullité de l’acte de cautionnement ne peut être prononcée par les Tribunaux que si le non respect des mentions obligatoires est suffisamment significatif, et s’il ne résulte pas d’une simple erreur matérielle.


(Les informations contenues dans cet article, bien qu'elles soient de nature juridique, ne constituent ni un avis juridique, ni une consultation. Pour tout litige ou problématique en rapport avec le sujet traité vous êtes invités à prendre contact avec un avocat en droit des affaires)

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